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Au cœur du célèbre Fouta Djalon, au nord-est de Conakry, dans la ville de Mamou, l’autonomisation des femmes et filles repositionne de nombreuses destinées. Pour réduire l’impact négatif des pratiques néfastes comme les Mutilations Génitales Féminines (MGF) sur la vie des filles, le Centre d’Autonomisation et d’Entreprenariat Femmes/filles (CAEF) de Mamou, forme chaque année des dizaines de femmes et de filles dans diverses filières, notamment, la couture, la coiffure, la teinture, la saponification, l’art culinaire, la transformation agroalimentaire etc. ainsi que le leadership et l’alphabétisation fonctionnelle. Grâce à cette école de seconde chance, ces femmes et filles sont devenues des soutiens importants pour elles-mêmes et pour leurs familles et des relais communautaires pour la promotion de l’abandon des MGF et autres pratiques néfastes.

En 2019, à la suite de l’appui opérationnel du CAEF de Mamou par le Fonds des Nations Unies pour la Population, près de 200 femmes et filles ont obtenu leurs certificats de formation en couture et coiffure. En plus, ces femmes et filles ont été organisées en groupement d’intérêt économique et dotées en équipements et matériels pour le démarrage de leurs activités. C’est ainsi que sont nés de nombreux centres de couture et coiffure dans la ville carrefour.

Par ailleurs, afin de s’engager et devenir les relais communautaires dans la promotion et la protection des droits des femmes et filles, elles ont été initiées à des notions sur le leadership, les violences basées sur le genre et les pratiques néfastes, notamment, les mutilations génitales féminines qui arbore les taux de prévalence de 95 % chez les filles et femmes de 15 à 49 ans et 48% chez les moins de 15 ans, dans la région de Mamou (EDS, 2018).

Fatoumata Binta Diallo, la trentaine, mère de 2 enfants, est l’une des anciennes élèves, diplômée du CAEF de Mamou en 2019. Mariée peu de temps après avoir ouvert son atelier de couture– Fatoumata Binta Diallo soutient aujourd’hui 5 frères et sœurs financièrement. « Nous avons appris au CAEF et de là, nous avons été appuyées pour installer notre atelier » indique Fatoumata Binta pour décrire les premiers pas de son business qui est devenu bien florissant dans le quartier Hafia de la commune urbaine de Mamou. « Depuis l’ouverture de cet atelier avec 3 autres personnes, nous avons formé en tout 120 filles », affirme Fatoumata Binta, les yeux pétillant de joie. Fatoumata et ses amies, témoignent « qu’elles sont devenues aujourd’hui plus fortes et peuvent aussi décider pour elles – mêmes ».

Dans plusieurs quartiers de la commune urbaine de Mamou, ces femmes et filles diplômées du CAEF ont installé leur atelier et font des prouesses. C’est le cas de Fatoumata Barry. Elle encadre 18 élèves qui font la couture dans son atelier. Elle combine à son atelier de couture, un petit commerce. Fait simple, voir divers à première vue – mais trop important pour Fatoumata Barry. « L’épargne de mon atelier de couture est investie dans mon commerce d’alimentation générale » affirme – t – elle.

Au grand marché de Mamou, Adama Donzo Camara – aussi diplômée du CAEF, dirige un atelier de couture bien prisé. Dans ce quartier, elle est bien connue et son service ne manque pas de clients. Il y a quelques années, Adama n’avait que des rêves. Aujourd’hui, elle a un business et a établi un fort partenariat avec d’autres couturiers notamment des hommes. Elle dirige avec compétence une équipe de près d’une quinzaine de professionnels aguerris de la couture et d’une quinzaine aussi d’apprenants. « Pour diversifier ma clientèle, j’ai fait appel à des spécialistes en broderies, couture hommes et je fais des prêts à porter que nous commercialisons jusqu’à Conakry ». Au-delà de la commune urbaine, certaines des diplômées du CAEF sont dans certaines préfectures de Mamou. Un groupe s’est installé à Conakry et peut rivaliser avec les expertes de la mode à Conakry.

 

L’autonomisation rend ces femmes et filles fortes face aux violences basées sur le genre y compris les Mutilations Génitales Féminines

Assise derrière sa machine à coudre, le regard serein, Suzanne Sakovogui donne des instructions aux filles qu’elle encadre dans son atelier ouvert en 2019 dans le quartier abattoir de la commune urbaine de Mamou. Elle est aussi diplômée du CAEF, après avoir échappé de justesse au mariage forcé.  « Avant, je souffrais beaucoup, je n’avais aucun espoir, mais aujourd’hui, je me prends en charge et je prends en charge ma famille » témoigne Suzanne Sakovogui. Actionnant sa machine à coudre avec précision à travers ses mains et pieds très agiles, Suzanne est « satisfaite » d’être aujourd’hui la formatrice de plus d’une dizaine de jeunes filles déscolarisées ou non scolarisées. Elle aussi donne de l’espoir à d’autres jeunes filles.

A l’image de Suzanne et ses amies, plusieurs jeunes filles, protégées du mariage d’enfants et de l’excision ont été enrôlées dans l’une des filières du CAEF. « Nous pensons qu’une fois qu’elles sont sauvées, il faut leur donner des compétences et des connaissances », souligne Kadiatou Diallo la Directrice du Centre d’Autonomisation d’Entreprenariat Femmes/filles de Mamou.

Les femmes et les filles dans les régions de la Guinée sont souvent confrontées à des obstacles structurels, dont les normes sociales discriminatoires, qui entravent leur accès à des services, des ressources et des opportunités. Certaines des filles et femmes du CAEF de Mamou sont souvent victimes du mariage précoce, des violences domestiques, du viol. A Mamou, 49% des femmes et filles de 15 à 64 ans ont été victimes au moins d’une forme violence (hors excision) depuis l’âge de 15 ans.

Comme l’indique la jeune gestionnaire du salon de beauté « CAF JUNIOR », situé au côté nord – est de la maison des jeunes de Mamou, « aujourd’hui, j’ai un compte bancaire ». Poursuivant sur un ton rempli de joie, elle indique : « quand ma famille me regarde, elle se demande comment une jeune fille de mon âge peut réussir au tant dans un salon de beauté, quand ma famille me voit ici, elle est si fière ».

Ce salon de beauté est le seul qui regroupe pour le moment à Mamou, les élèves sortant du CAEF. « Pour mettre en place un salon de coiffure et de beauté, ce n’est pas facile. Ce groupe est notre première promotion et nous en sommes trop fières » témoigne Kadiatou Diallo la Directrice du CAEF de Mamou.

Pour parvenir à l’élimination des pratiques néfastes, l’investissement dans l’autonomisation des femmes et filles constitue l’une des approches les plus efficaces. C’est ce qui motive l’appui de l’UNFPA au gouvernement à travers le CAEF de Mamou par la formation et l’installation des business de près de 200 femmes et filles depuis 2019.