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Jeune et dynamique, Fanta Camara est une figure bien connue dans le milieu de la société civile à Kankan, une localité située à environ 700 kilomètres de Conakry. Dans cette communauté où les mutilations génitales féminines sont ancrées dans les habitudes des populations, Fanta Camara et ses amies, organisées au sein de l’antenne régionale du Club des Jeunes Filles Leaders de Guinée, informent, sensibilisent et essaient de délier les langues au tour de ce sujet si sensible. Quelque fois rejetée et même injuriée par les personnes auprès desquelles elle porte son message sur la nécessité de l’abandon de cette pratique, Fanta Camara ne baisse pas pour autant les bras. Elle brave vent et marrée pour donner aux générations futures, la possibilité de vivre dans un environnement sans mutilations génitales féminines. Dans cet entretien, elle nous parle de son travail pour l’abandon des Mutilations génitales féminines et les défis auxquels elle fait face dans ce combat.

Vous êtes considérée comme un modèle dans la lutte contre les mutilations génitales à Kankan. Parlez-nous de votre travail.

Nos interventions se situent spécifiquement sur la sensibilisation et la diffusion des messages sur les conséquences de cette pratique et les raisons qui justifient que nous ne devons pas la continuer. Nous faisons des échanges avec les différentes composantes de la communauté à travers les causeries éducatives, le porte-à porte, les émissions radiophoniques, les dialogues communautaires…

Pour les émissions, elles sont réalisées par les radios en partenariat avec l’Inspection Régionale de la Promotion Féminine, de l’Enfance et des Personnes Vulnérables avec l’appui technique et financier de l’UNFPA, le Club des Jeunes filles Leaders et d’autres partenaires comme Global campaign Média. Nous passons aussi dans les ‘’grins’’, espace de retrouvailles des jeunes hommes, pour échanger avec eux sur les conséquences des mutilations génitales féminines sur la santé des jeunes filles et les inviter à s’impliquer activement dans la promotion de l’abandon de cette pratique. Nous parlons aussi beaucoup avec les filles pour qu’elles soient elles – mêmes conscientes du danger de cette pratique.

Où trouvez-vous les filles à qui vous parlez ?

Nous organisons souvent des causeries éducatives dans les ateliers de couture, nous passons dans les familles. Nous échangeons avec elles sur les conséquences des MGF et sur comment valoriser les filles non excisées.

Le sujet sur les mutilations génitales féminines est très sensible, est ce que vous rencontrez des difficultés pour faire passer votre message dans les communautés

Ce n’est pas facile et jusque maintenant, ce n’est toujours pas facile. Mais les choses commencent à aller mieux parce qu’avant, la manière dont les gens étaient réticents, ce n’est plus pareil. Certaines personnes ont commencé à comprendre le message.

Que disent – ils, généralement, ceux qui sont favorables aux messages, ?

Ils nous disent, « tout ce que vous venez de dire, on a compris et on voit que vous avez raison »

Et ceux qui sont hostiles, que disent – ils ?

Ils affirment qu’ils sont nés et ont grandi avec cette pratique, et ils ne peuvent pas changer. Ils nous disent même que nous n’avons pas l’âge de parler de ce sujet. Ils nous rejettent et nous menacent. Parfois, ils ont des mots très durs à notre égard.

Arrive – t – il que cette hostilité des communautés refroidisse votre engagement pour la promotion de l’abandon des mutilations Génitales Féminines ?

 Parfois, je me dis, mais à quoi ça sert de continuer à travailler sur ce sujet avec des communautés qui ne veulent pas coopérer et ne veulent pas du tout comprendre ? Quand elles nous insultent et nous chassent, je me pose souvent cette question. Mais après, quand je reviens chez moi, je m’encourage et je me dis que je ne dois pas abandonner car ce qui m’est arrivé ne doit pas arriver à d’autres filles. Je me dis qu’on peut finir avec cette pratique à force de persévérer dans la lutte. C’est comme ça que je me remets au travail. Je ne peux pas abandonner car je me suis engagée à contribuer au changement dans ma communauté.