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C’est un jour pas comme les autres à Mamou, la ville carrefour où le brassage et la diversité culturels retiennent toujours l’attention. C’est un jour où, au coeur de l’espace jeune, installé dans la maison des jeunes de la commune urbaine de Mamou, une soixantaine de jeunes, femmes, hommes, sages, religieux et autorités locales se sont réunis pour un dialogue franc, sans langue de bois sur les mutilations génitales féminines. Au terme de près de 3 heures d’échange, tous les participants ont été informés sur les dangers que courent les victimes de cette pratique et l’urgence d’y mettre fin. 

Organisé par les militantes du Club des Jeunes Filles Leaders de Guinée et de l’Association Mafubo Guinée, ce dialogue intergénérationnel est une activité de la campagne “les voix de la conférence internationale pour la population et le développement en Guinée (CIPD)”. Axé sur le thème “quel partenariat de génération pour accélérer la lutte contre les violences basées sur le genre notamment les mutilations génitales féminines même au dernier kilomètre”, ce dialogue fut un moment de partage et d’échange sur les approches de collaboration pour l’abandon de cette pratique. “Une fois que nous avons compris pourquoi lutter contre les mutilations génitales, nous devons chercher à savoir comment arrêter cette pratique, c’est là que nous rentrons dans un dialogue au sein des familles, des communautés et s’entendre sur cette question” a affirmé le Représentant de UNFPA en Guinée, Francesco Galtieri. 

En Guinée, les mutilations génitales féminines constituent un réel problème de société, affectant les filles et les femmes dans leur dignité, leur santé et leur intégrité physique. “Nous ne pouvons plus nous permettre de tolérer cette pratique, 39% des filles de moins de 15 ans et 95% des femmes de 15 à 45 ans subissent cela chaque année” a déclaré haut et fort Christelle Toni, membre de Mafubo Guinée au terme de ce dialogue. Ce dialogue est donc initié pour discuter pour libérer la parole des filles et femmes sur leur douleur en lien avec les MGF. Pour Hawa Diallo, du Club des Jeunes Filles Leaders de Guinée (CJFLG), “ces chiffres prouvent à suffisance les difficultés liées au changement mais ils cachent sans doute d' énormes efforts accomplis par le Gouvernement et ses partenaires ces deux dernières décennies”.

En effet, au cours des 30 dernières années qui ont connu la mise en œuvre de l’agenda de la CIPD, la question de l’éradication des MGF a été au cœur des actions des autorités guinéennes. La pratique est officiellement interdite par la loi. “Des cas de MGF sont portés devant les juridictions compétentes, même si c’est timidement et nous voyons que plus personne n’a le courage de pratiquer les MGF ouvertement” souligne Fatoumata Niakaté, du CJFLG de Mamou. “Bien que plusieurs filles soient protégées de cette pratique, nous devons continuer à renforcer la sensibilisation” recommande Kadiatou Baïlo Soumano, Inspectrice Préfectorale de la Promotion Féminine à Mamou. 

La question de la médicalisation des MGF et la résistance des religieux face à l’abandon total ont été mises en exergue comme défis à relever en élargissant ce type de dialogue intergénérationnel. Plusieurs participants au dialogue ont estimé qu’il faut rendre l’application de la loi effective sur ce sujet. Et pour le Secrétaire Général du Ministère du Plan et de la Coopération Internationale qui préside ce dialogue, “la Guinée est constituée de 52% de femmes, lorsque ces femmes sont bien dans leur peau, c’est toute la société guinéenne qui va en bénéficier, nous devons donc arrêter les MGF”.