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Waraba Sidibé, un potentiel inexploité pour la paix dans l’espace transfrontalier Siguiri – Kangaba (entre la Guinée et le Mali)

Waraba Sidibé, un potentiel inexploité pour la paix dans l’espace transfrontalier Siguiri – Kangaba (entre la Guinée et le Mali)

Story

Waraba Sidibé, un potentiel inexploité pour la paix dans l’espace transfrontalier Siguiri – Kangaba (entre la Guinée et le Mali)

calendar_today 07 Août 2024

Waraba dans son champ - @Afiwa
Waraba dans son champ - @Afiwa

Guinée - “la paix est une question entre nos deux peuples est une question de choix individuel et collectif” murmure Waraba Sidibé, au rythme du son mélodieux du vent froid qui souffle en cet après-midi pluvieux du mois de juillet à Siguiri, localité située à 600 kilomètres de Conakry. Cette mère de 10 enfants travaille la terre et en fait son gagne pain. Aujourd’hui, elle se sent en paix dans une activité qui lui apporte un début de satisfaction et au travers duquel elle élargit son réseau professionnel et social au-delà des frontières guinéennes. 

Assise dans sa ferme où elle cultive avec un groupe de femmes des aubergines, du piment, du gombo et du maïs, Waraba espère “développer son activité pour ne pas retourner dans les mines et contribuer à pacifier cette zone minière partagée par la Guinée et le Mali”. Bâtie sur une superficie de 20 hectares, cet espace agro-pastoral est le résultat de dures labeurs de waraba et ses amies, qui ont compris que l’agriculture nourrit et protège mieux l'environnement. 

Waraba dans son champ avec un panier de produit agricole en main - @Afiwa

“Nous faisons la culture maraîchère et nous avons un cheptel de plus d’une trentaine de têtes de bœuf” déclare - t - elle en montrant du doigt le bétail qui broute les herbes non loin de là.  Ces bœufs dont la taille varie de 1, 20 à 1,50 m de hauteur sont suivis et entretenus par des éleveurs peuls venant de la République du Mali. Ces éleveurs sont employés par le groupement de Waraba.  

“Les relations de collaboration entre les communautés de part et d'autre de cette zone transfrontalière est une réalité commune à toutes les zones partagées par la Guinée et le Mali”, affirme Ousmane Bayo, Agent de Développement Local qui suit de près le travail de  Waraba et ses amies. Poursuivant, il indique que “certains jeunes maliens viennent ici pour aider à élever et surveiller le bétail, ils viennent avec leurs femmes et leurs enfants et y restent pendant des années”. 

Pour établir cette collaboration entre malien et guinéen, il faut un tuteur

“Nous avons une personne de confiance de l’autre côté de la frontière, qui est notre tuteur sur place” explique Waraba. Un tuteur qui est le garant du lien de confiance entre les deux peuples des deux côtés de la frontière. “Quand nous avons besoin des éleveurs et de la main d'œuvre pour la culture, nous allons au Mali pour solliciter l’appui de notre tuteur” poursuit - elle en ramassant quelques aubergines qui traînent à terre. 

Le tuteur est l’intermédiaire, d’origine malienne, qui explique à ces compatriotes qui souhaitent venir travailler dans la ferme de Waraba, les termes de la collaboration. Rien ne se négocie en dehors de lui. “Ils parlent aux jeunes, leur explique toutes les conditions pour le logement, les salaires…” nous fait observer l’une des amies de Waraba. Ce tuteur est respecté, il fait office de celui qui gère les conflits qui pourraient intervenir dans la collaboration. Mais les conflits sont rares nous dit - on. 

Ce type de collaboration, bien que basique et ne reposant sur aucune garantie légale, est toujours respecté par les différentes parties. “Nous respectons toujours nos engagements parce que le tuteur nous fait confiance et aussi parce que la main d'œuvre qualifiée est rare ici, nous ne pouvons pas nous permettre de perdre la confiance de nos frères maliens”. 

Les fermes comme celle de ce groupe de femme ne sont pas très courants dans cette zone, car les jeunes pour la pluspart sont dans les mines et préfère l’orpaillage artisanal que les travaux champêtres. Aujourd’hui, le modèle de collaboration établi par ces femmes constitue une passerelle sûre pour la prévention des conflits.

Hier dans les mines, aujourd’hui dans l’agriculture et l'élevage 

Avant de s’engager dans l’agriculture, Waraba faisait l’orpaillage artisanal. “On sortait le matin et on creusait toute la journée pour trouver un peu d’or” se remémore - t-elle. Sur un ton de regret, elle affirme : “j’ai été dans les mines pendant de nombreuses années avec l’enfant au dos, et toute la journée il était exposé à cette grande pouissière, au soleil”. 

Les longues années de Waraba dans les mines ne lui ont pas permis de gagner sa vie comme elle le souhaitait. “Après toutes ces années, je n’ai pas pu mettre tous mes enfants à l’école, sur les 10 enfants, seuls 3 ont étudié” affirme - t - elle le regard chargé de regret. Elle aurait voulu que tous ces enfants étudient. Mais hélas, 7 sur 10 n’ont aucune instruction et sont aussi aujourd’hui attirés par les mines. 

Waraba et ses amies - @Afiwa

Waraba et ses amies ne veulent pas retourner dans les mines. Leur grand rêve est d’élargir leur activité agricole. “Nous manquons d’eau pour irriguer les terres notamment en saison sèche” explique - t - elle. Avec l'exploitation avancée et peu contrôlée des ressources minières, les sources d’eau tarissent dans la zone et la pluie se fait rare. “Nous aurons besoin d’un bon forage pour avancer dans notre travail” indique - t - elle. 

L’UNFPA, le PNUD et l’ONUDC, à travers un financement du PBF, compte accompagner le développement de ce modèle d’activités génératrices de revenu (AGRs) dans le domaine de l‘ agroécologie durable en faveur des jeunes et des femmes dans les zones d’exploitations d’orpaillages, dans l’espace transfrontalier Guinée-Mali. Cela permet de réduire les conflits liés aux ressources et d’établir la paix à travers le tissu économique local, c’est dans ce cadre, qu’une équipe 

Ainsi, Waraba et son équipe ont reçu une visite d’une équipe du projet conjoint de PNUD et l’UNFPA intitulé “appui à la prévention des conflits et renforcement de la résilience économique des communautés transfrontalières de Guinée et du Mali” financé par le Fonds pour la consolidation de la paix (PBF). Cet appui attendu d’ici la fin de l’année 2024, devrait aider à renforcer leur technique agricole, l'accès à l’eau et la commercialisation à l’échelle nationale. “Un appui qui va aider aussi sceller de manière formelle la collaboration transfrontalière dans cette zone, afin d’en faire un élément de cohésion sociale” a indiqué pendant la visite de terrain, Abdourhamane Sagnane, Spécialiste développement des jeunes, et point focal du projet à UNFPA Guinée.