Kankan, commune urbaine - « J’ai été victime de l’excision et depuis mes règles sont devenues très douloureuses, c’est après que j’ai compris que c’est l’excision qui était à la base de ce problème ». Fanta Camara, jeune fille dans la vingtaine, explique que la mutilation génitale féminine (MGF) est courante dans la région de Kankan. Bien que les résultats sur l’abandon des MGF entre les deux (2) dernières Etudes Démographiques et sanitaire (EDS) sont encourageants (-25% de baisse chez les filles de 0-14 ans et -2,5% chez les filles et femmes de 15-49 ans entre 2012 et 2018) dans cette région, située à environ 700 kilomètres de Conakry, il n’en reste pas moins de filles qui continuent de subir le phénomène à cause des pesanteurs socioculturelles.
Face à ces défis qui ralentissent l’abandon des mutilations génitales féminines, des jeunes filles comme Fanta Camara s’engagent contre cette pratique.
Fanta et ses amies sont au nombre de 31 jeunes filles réparties entre les 5 préfectures de la région administrative de Kankan. Elles militent au sein du Club des Jeunes Filles Leaders de Guinée. Leur combat est le même depuis 2020, année à laquelle la première antenne a été installée dans la commune urbaine de Kankan.
« Chaque semaine, nous sortons au moins une fois pour faire des causeries éducatives intergénérationnelles, nous faisons aussi du porte à porte dans les familles et nous parlons aux papas, aux mamans et aux jeunes », raconte Fanta Camara avec un air de satisfaction. Le groupe de 31 jeunes filles occupe aussi les médias pour passer leur message sur les méfaits de cette pratique sur la santé physique et mentale, ainsi que sur le bien-être des femmes et des filles.
Le partenariat avec les médias notamment les radios est un moyen efficace qui touche de nombreuses communautés dans la région. Les programmes sont parfois interactifs. Depuis 2020, elles ont réussi à protéger plusieurs filles de cette pratique et ont réussi 3 signalements dont les autorités de la région ont pris les cas en main.
Au-delà de Kankan, à environ 1000 kilomètres de Conakry, dans la région de N’zérékoré, un autre groupe du Club des Jeunes Filles Leaders de Guinée fait aussi le même travail et de façon remarquable. Des filles qui se lèvent contre des normes sociales de plusieurs centaines d’année impressionnent les uns et irritent les autres. Les Filles du Club des Jeunes Filles Leaders de Guinée, même du niveau central à Conakry sont souvent intimidées et insultées sur les réseaux sociaux à cause de leur engagement contre cette pratique.
« Souvent, on nous insulte, on nous traite de filles mal éduquées et on nous chasse quand nous commençons à indiquer les méfaits des MGF », témoigne Aïssatou Sow, 23 ans, Présidente du Club des Jeunes Filles Leaders à N’Zérékoré.
Depuis 5 ans, Aïssatou Sow et ses amies travaillent durement pour amener les familles de N’Zérékoré et des préfectures environnantes à abandonner la pratique des mutilations génitales féminines. Elles sont souvent victimes du rejet, d’injures et d’intimidation de personnes plus âgées. Même quand leur sécurité est menacée, elles ne se découragent pas.
« Souvent, quand on nous insulte et qu’on insulte aussi nos parents, on se sent tellement découragé, mais après je me dis toujours que je ne peux baisser les bras » explique Aïssatou Sow. Avec un ton bien déterminé, Aïssatou Sow indique que « les filles que nous avons protégées prennent l’exemple sur nous, et cela est une fierté ; je ne peux pas abandonner quand je pense qu’il y a encore d’autres filles qui risquent de subir cette pratique ».
Malgré la présence des pesanteurs socioculturelles, l’espoir est permis de venir à bout de souffle du phénomène. Le combat de ces jeunes filles qui tiennent tête à une pratique millénaire est devenu l’élément de motivation pour plusieurs parents qui décident librement de ne plus exciser leurs filles. Chaque année, le Club des Jeunes Filles Leaders bénéficie d’un appui technique et financier du Fonds des Nations Unies pour la Population (UNFPA) à travers le Ministère de la Promotion Féminine, de l’Enfance et des Personnes Vulnérables et ses services déconcentrés pour poursuivre leur travail sur le terrain.